Cœurs et corps meurtris
Revenir sur ses terres.
Retrouver sa famille, son logis.
Son île souvent perçue comme une prison mais devenue paradis dans les mémoires des combattants.
Juin 1914, tout a basculé sur cette île bretonne. Pêcheurs, paysans, curé et instituteur meurent pour leur patrie. Après le désespoir, leurs épouses n’ont pas d’autres choix… que de retrousser leurs manches. De mois en mois, d’année en année, chaque partie du corps de celui qui partageait le lit clos, parfois haï, souvent désiré, n’appelle plus leurs sens. C’est près de Maël, jeune facteur réformé que ce plaisir renaît – lire le livre 1.
Dans les tranchées, une carte postale postée par Maël, serrée fort dans les mains tremblantes, porte la souffrance des soldats.
1918, quelques survivants rentrent. Reprendre l’ouvrage et reprendre sa place au sein du foyer. Pourtant tout a changé sur cette petit île ; plus rien ne ressemble à la photo jaunie ou à la carte postale cornée. Il y a de lourds secrets que les femmes plus fragiles n’arrivent plus à garder.
Se libérer de l’oppression
Le retour des îliens pour ce second tome bouscule de nouveau le quotidien des travailleuses. Elles ont lutté et aussi combattu. La guerre ne s’est pas faite par les armes mais par les outils, la sueur, la solidarité. Dans les champs, sur le front de mer, par tous les temps, elles ont lutté pour survivre. Elles souhaitent la paix. La bataille reprend au retour des maris. Certaines n’auront de cesse de se libérer de cette oppression. La liberté elles l’ont gagnée par la sueur du labeur.
L’après-guerre n’a rien d’idyllique. L’émancipation reste encore réservée à une classe sociale. En Bretagne et dans toutes les campagnes de France, les femmes se heurtent aux refus des hommes de reconnaitre l’égalité.
Coiffes, costumes et patrimoine breton
Toujours curieuse (oui je sais ça fatigue mon entourage), il a bien fallu que je sache où se passe cette fiction. J’avais en tête depuis le début qu’elle se passait à l’Ile de Sein. Vous allez me dire Quelle importance ! Oui et non. La terre, les éléments, la situation géographique. Tous ces éléments sont importants. Ils définissent un territoire où une population s’adapte à la région et se forge un caractère.
Ma copine Nolwenn, reine de Cornouaille dans les années 90 (je sais plus si c’est 91 ou 99), pense que ces coiffes joliment dessinées par Manu Cassier, proviennent du Pays Vannetais et plus particulièrement de l’Ile de Groix. J’ai pour cela suivi un tuto de 15 min sur la pose de coiffe groisillonne… Maintenant je peux vous poser une coiffe sans vous transpercer le crâne. Enfin on ne va pas s’exciter tout de suite quand même !
Les auteurs
Didier Quella-Guyot, scénariste, Professeur de lettres, auteur d’ouvrages pédagogiques et critique de bandes dessinées collabore pour le premier tome de Facteur pour femmes avec Sébastien Morice, dessinateur, né à Vannes en 1974.
Pour le numéro 2, Didier Quella-Guyot s’associe avec Manu Cassier, dessinateur, né à Paris en 1972. Sa première collaboration avec Didier donne naissance au livre Esclaves de l’île de Pâques, paru en 2018.
Dualité de paysages, de caractères…
Pour ce second opus, même scénariste, Didier, dessinateur différent, Manu.
En feuilletant les pages du livre 2, j’ai rapidement saisi des mines plutôt inquiètes, de la tristesse voire de la colère. Les personnages semblaient soucieux.
Effectivement, ces auteurs n’ont pas donné le rôle de Belle des champs à nos héroïnes. Et c’est ce qui m’a plu. Autant le premier tome semble idyllique. Peut-être romantique je dirais. Autant l’univers de Manu Cassier est plus mélancolique.
Facteur pour femmes 2 m’a semblé plus brutal. Vivre sur une île n’a rien de facile. Les corps et les humeurs se heurtent parfois au dur quotidien (cela ne veut pas dire que ce n’est pas magnifique et enrichissant d’y vivre). Cela a résonné beaucoup plus en moi, la bretonne que je suis.
Ces deux tomes se complètent parfaitement ! Le romantisme de la Bretagne et toute sa dureté. Deux très beaux ouvrages.
Comme une femme, comme un homme, ce qui fait de nous notre originalité !
Avec plaisir, je serais heureuse d’offrir ces deux tomes aux éditions Bamboo si vous pouvez vous rendre sur Quimper (j’aime quand les livres continuent à vivre). Pour cela un mail à jupettedejeannette Arobase gmail point com 🙂